L’actualité récente nous a abreuvés du refrain selon lequel il y aurait « Trop de normes », notamment dans le secteur agricole… Il est entendu que le reproche s’adresse plus directement à la réglementation qu’à la normalisation volontaire, fut-elle harmonisée. Cela n’interdit pas pour autant de s’interroger sur la valeur ajoutée de la normalisation. Alors, concrètement ? Peut-on imaginer à quoi ressemblerait une filière agroalimentaire sans normes ?
Prenons l’exemple de la filière des abattoirs et des machines qui y sont utilisées.
Cette filière est régulièrement mise en avant dans les médias pour des pratiques inadaptées, en réalité le plus souvent des dysfonctionnements des dispositifs et équipements employés. Ces dysfonctionnements mettent en danger les opérateurs et vont à l’encontre du cadre réglementaire Européen sur le bien-être animal au moment de sa mise à mort.
En 2018, la commission de normalisation UNM 28, Équipements agro alimentaires – Préparation et conditionnement a initié des travaux de révisions de normes françaises datant des années 1990, qui se révélaient totalement obsolètes dans la pratique.
Avec l’appui des fabricants de machines, ces travaux ont démarré par la révision de la NF U 66-053, Équipements pour les abattoirs – Boxes d’abattage – Prescriptions relatives à la sécurité et à l’hygiène.
Une fois le contenu technique et les prescriptions de sécurité consolidés au niveau national avec la publication de la norme française en 2019, la France a proposé la création d’un groupe de travail au niveau européen pour développer une norme harmonisée Machines basée sur la norme française. Dans ce cadre, le CEN/TC 153/WG 14 , Machines et équipements pour abattoirs a été créé fin 2018, dont l’animation est assurée par Fabrice Chevaleyre (AMICS) et le secrétariat par Arnaud ROBERT (UNM). À l’heure actuelle, le projet de norme européen FprEN 17657, Équipements pour les abattoirs — Boxes d’abattage pour bovins — Prescriptions relatives à la sécurité et à la nettoyabilité est en cours de finalisation.
Repartant quasiment d’une page blanche normative, il a été décidé d’appliquer la même procédure pour les autres sujets de normalisation, à savoir : le développement d’une norme au niveau national pour donner une longueur d’avance aux acteurs français, puis proposition française au niveau européen.
Le sujet suivant a porté sur les plateformes élévatrices fixes et la NF H 95-420-1, Équipements pour les abattoirs – Plates-formes à hauteur réglable et non réglable – Prescriptions de sécurité et de nettoyabilité – Partie 1 : Plates-formes élévatrices fixes a été publiée en mai 2023. Cette norme fait actuellement l’objet de discussions au niveau européen. En parallèle, une autre norme française est en cours de finalisation sur les plateformes mobiles (prNF H 95-420-2).
Un projet de norme sera également prochainement élaboré, portant sur les prescriptions de sécurité liées à l’utilisation des pistolets d’assommage. Ce sujet a été à l’initiative des travaux de la filière des abattoirs, mais des essais complémentaires ont été nécessaires pour valider le contenu technique du projet.
Par la suite, un projet de norme de sécurité sera élaboré pour les arracheuses de cuir.
Enfin, la France va proposer une révision de la norme NF EN 12984, Machines pour les produits alimentaires – Machines et appareils portatifs et/ou guidés à la main munis d’outils coupants mus mécaniquement – Prescriptions relatives à la sécurité et à l’hygiène.
Toutes ces normes seront impactées par le déploiement du nouveau Règlement Machines (2023/1230). Le comité européen se met en ordre de marche pour s’assurer que les normes actuellement en vigueur soient adaptées au nouveau règlement et pour intégrer les nouvelles exigences réglementaires.
Hormis le fait d’améliorer la sécurité des opérateurs dans les abattoirs et de prendre en compte le bien-être animal indispensable pour tous les acteurs de la filière, l’élaboration de ces normes permet aux fabricants de machines de s’appuyer sur des référentiels techniques solides.
Aux niveaux national et européen, l’ensemble de ces travaux est assuré en étroite collaboration avec les expertises des fabricants de machines, des préventeurs (INRS2, BGN3) et du Ministère du Travail.
Source de l’article : AFNOR – SECURI NORM n°194 – Que serait la filière alimentaire sans normes ? – rédigé par Arnaud ROBERT