SOURCE : Camille CLOITRE, analyste conseillère, Département des Affaires Internationales AFNOR
L’exemple le plus frappant d’une telle stratégie est sans doute celui de la Chine et de sa spectaculaire progression à l’ISO et à l’IEC depuis le milieu des années 2000. La normalisation internationale a également été utilisée comme levier d’influence par le Royaume-Uni face à la perspective d’un recul de son positionnement au niveau européen : suite au référendum sur le Brexit de 2016, BSI s’est montré particulièrement proactif dans la conquête de nouvelles responsabilités à l’ISO, renversant la tendance au déclin du nombre de ses secrétariats. D’autres pays ont également explicitement inscrit dans leurs stratégies nationales le renforcement de leur présence dans la normalisation internationale, comme la Corée du Sud en 2019, dans le cadre de son plan pour la Quatrième révolution industrielle, ou plus récemment de l’Australie qui, dans son plan de relance 2020, consacre 5,9 millions de dollars australiens (environ 3,64 millions d’euros) au renforcement de son influence sur les normes internationales.
Les États-Unis ne sont plus en reste de cette tendance. Jusqu’à récemment, on constatait une stagnation, voire un déclin de leur implication à l’ISO et à l’IEC. On a pu y voir une conséquence de la méfiance de l’administration Trump pour le multilatéralisme.
L’an dernier cependant, le Congrès a commandé au National Institute of Standards and Technology (NIST) une étude sur l’impact des activités de la Chine sur les normes pour les technologies émergentes, en adoptant un texte dont le titre ne laisse guère de doutes sur ses ambitions : « the Ensuring American Leadership over International Standards Act of 2019« . Si ce texte ne prévoit pas d’autres mesures concrètes que la conduite d’une étude, il semble vouloir souligner, ou rappeler, l’importance pour les États-Unis de ne pas céder le terrain à la Chine, notant en particulier : « Alors que les technologies émergentes se développent pour un déploiement mondial, il est essentiel que les États-Unis et leurs alliés continuent à façonner les normes sur lesquelles elles s’appuient […]. Le positionnement des États-Unis sur la normalisation des technologies émergentes sera essentiel pour notre compétitivité économique » (Traduction non officielle). L’avenir dira si, dans le contexte d’un changement d’administration, ce texte peut poser les premiers jalons d’une nouvelle dynamique des États-Unis dans la normalisation internationale.
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